Erik Orsenna est un conteur délicieux et généreux qui sait poser les mots pour faire voyager son lecteur. Il décrit les processus économiques avec le regard d’un passionné. Il raconte le phénomène de la rareté comme on nous lirait une histoire. Tour à tour économiste et philosophe, il explique les tenants et les aboutissants du système globalisé en partant du cas des matières premières. « Pour comprendre les mondialisations, celles d’hier et celle d’aujourd’hui, rien ne vaut l’examen d’un morceau de tissu » affirme-t-il. Voilà un auteur qui laisse fait le dessin du monde permettant de comprendre où et comment a été produit le T-shirt acheté en soldes dernièrement. C’est quelqu’un qui définit le développement durable non comme un luxe de pays riches mais comme une réaction nécessaire à la rareté.
Pour bien des aspects, la question du coton qui concerne 35 pays africains et fait vivre plus de 16 millions de personnes en Afrique de l’Ouest, résume à elle seule le paradoxe de la gestion des matières premières : jamais la quantité et la qualité n’ont été aussi élevées ; jamais sans doute la filière n’a été confrontée à une crise financière et sociale d’une telle ampleur. La réussite éclatante des cotonculteurs africains a entraîné une dépendance accrue des pays cotonniers vis-à-vis du marché mondial. Enfin, le succès agricole du coton en Afrique n’a pas eu de relais industriel.
Un monde de ressources rares, p. 21 Lire la suite